Chaque année apporte son lot de découvertes musicales fortes. Si mon penchant pour le rock ne se dément pas, j'ai conservé depuis l'adolescence un tropisme fort pour la chanson française « à texte » comme on dit. Grâce à mes divers journaux préférés, j'ai pu découvrir ces dernières années des gens sensationnels comme Camille, Florent Marchet, Jeanne Cherhal, Coralie Clément, Cali, Romain Humeau, etc.
Parfois, ce fut plus fortuit et généralement plus confidentiel : Clarika (cela commence à faire longtemps : 1992 !), Bastien Lallement, Fabien Martin, Thibaud Couturier... Et depuis 2006, dans ce registre partiellement fortuit, Nicolas Bacchus. Et j'ai envie de lui faire de la pub, parce qu'il est à mon avis des plus talentueux et, ce qui ne gâche rien, parce que ses humeurs politiques me ravissent. Peut-être certains d'entre vous en ont entendu parler. Il semblerait passer dans certaines bonnes émissions de radio (comme celle d'Hélène Hazéra sur France culture), mais il n'est pas du genre que les bien pensants s'autorisent à diffuser : « grande gueule » comme François Béranger, plus décapant que Renaud (jeune), plus rose que Dick Annegarn, plus irrécupérable que Léo Ferré. Bon, peut-être fais-je dans le dithyrambe excessif, mais tant que vous n'aurez pas essayé, vous ne pourrez pas le vérifier.
Il a trois albums à son actif. Seuls les deux derniers sont disponibles : Balades pour enfants louches (2002, un album enregistré en live), et À table. Chansons bleues ou à poing (2005).
De son vrai nom Nicolas Bages, il écrit à peu près 30 à 50 % des textes de ses chansons, secondé par deux amis, Dany Rodriguez et Erwan Temple, et presque toutes les musiques. Quelques titres marquants : « Les Sans papiers », « Les restos » (du coeur), « Ton fils (...dort avec moi) », « D'Alain à Line » (une merveille digne de Bobby Lapointe), « Les pommes, les papous, les châteaux », « Dans les saunas », etc.
TON FILS (... dort avec moi)
Paroles et musique : Nicolas BAGES
Toulouse est maquillée
Pour la nuit et sa clique
Dans les bouges, les cafés
Je porte ma musique
Y'a bien toujours quelqu'un
Pour m'prêter un plumard
Me dire que rentrer, c'est trop loin
Et endormir mon cafard
Mais ce soir-là, personne
J'sais pas où m'poser
Alors je traîne ma pomme
Là où c'est allumé
Y'a des gens tout serrés
Des néons bizarres
D'la musique à danser
Et en aidant le hasard
Non. Madame, cette nuit-là
Non, ton fils n'a pas
Dormi avec les filles
Non. Madame, cette nuit-là
Non, ton fils n'a pas
Ton fils a dormi avec moi.
Dans une boîte un peu glauque
Pire qu'au pire cinéma
Ça s'voyait. l'un comme l'autre,
Qu'on n'avait rien à faire là
On est sorti marcher
Pour entendre nos voix
Et au lieu d'se quitter
On s'est embrassé, comme ça
C'est drôle, mais ça r'semblait
A des rêves d'avant
Quelque chose qu'on cherchait
Tous les deux depuis longtemps
On s'est trouvé tous cons
On s'est serré plus fort
Nos corps ont des raisons
Que vos raisons ignorent
Pleure pas, jolie Madame,
Ton gars choisit sa vie
Va pas en faire un drame
Ton môme, je l'aime aussi
Et pas la peine de me chercher
A la Gay-Pride, dans ta télé
J'passe pas ma vie à m'planquer
J'ai pas b'soin d'un jour pour m'montrer.
Il a également un site très personnel, et qui vaut le déplacement :
On y apprend entre autres qu'il participe à un collectif de chanteurs qui fait des spectacles à propos du groupe pétrolier Total. Voilà ce que je pourrais dire en bref. J'espère que cela vous donnera envie d'aller y écouter d'un peu plus près.
Quand il était encore bébé
Xavier
Voyant sa mère qui pouponnait
Son cadet
Voulant tout faire comme maman
Tendrement
Langeait et berçait son ourson
Sans façons
(etc.)
Nicolas Bacchus
Les chansons foncièrement ambiguës ne sont pas les plus désagréables, car elles ouvrent un espace de spéculations toujours renouvelées. Elles portent une poésie intrinsèque dans l'incertitude et le neutre. Du moins est-ce mon point de vue. Ce sera tout pour l'instant. Je suis tout à fait ouvert à toutes les réactions possibles. N'hésitez pas !