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stephane corbin

Stéphane Corbin

Il y a encore une grosse semaine, j'ignorais tout de Stéphane Corbin. En cherchant à améliorer l'un de mes articles ici, je suis tombé sur sa page sur Myspace, et j'ai écouté les quatre chansons qui y figuraient. Elles sont extraites d'un album intitulé Optimiste (2004), un titre quelque peu ironique, sinon amer. J'ai immédiatement été séduit, notamment par "Le Bol", récit de vie rageur dans la meilleure tradition de la chanson française. L'intéressé revendique de toutes autres références : Nick Drake, Leonard Cohen, Kate Bush. Il n'empêche que sa musique et l'astuce de ses textes l'inscrivent aussi dans une veine plus locale. Personnellement, j'ai pensé surtout à Romain Didier, Philippe Châtel et un peu à Bénabar (c'est l'association la plus évidente à la première écoute, mais elle est superficielle).
images.jpgL'album est arrivé par la poste et j'ai découvert le reste du disque. La moitié des textes a été écrite par son père et son frère. Comme il le souligne dans une interview, cette association n'est pas allée de soi : "Mon frère a été le premier à m’écrire des textes. Puis mon père s’y est mis. Pour situer le contexte, je dois dire que j’étais un adolescent difficile. A l’époque, je ne communiquais pas du tout avec mes parents. Mon père a écrit des textes quand j’ai commencé à composer. C’est ainsi que le contact s’est renoué, c’est la façon qu’il avait trouvée pour communiquer avec moi." La cohérence des thèmes laisse à penser que c'est un disque assez personnel, pour ne pas dire autobiographique. Les arrangements sont d'une très grande élégance, avec une assise de piano qui fait l'essentiel du cousinage avec Romain Didier (il y a aussi quelque chose dans le phrasé de la voix). Une mélancolie délicate baigne nombre de titres. Mais il y a aussi des chansons rigolotes, comme "Droit au but", qui commence ainsi :
docteur, j'ai longtemps hésité
avant de venir vous consulter
dame, voir un psy c'est pas facile
ça fout les jetons, on se demande s'il
ne va pas découvrir des choses
cachées au fond, des trucs qu'on n'ose
pas vraiment regarder en face
qui font tourner le dos à la glace
mais j'en pouvais plus de me faire mal
à me demander si je suis normal
à vivre rongé par le doute
j'aime pas le foot
La suite est à l'avenant... Même quand le ton est plus dur, l'ironie n'est jamais loin. Dans "Sainte-Jeanne des acouphènes", le mélange des genres entre le burlesque et le pathétique atteint une intensité qui rappelle les meilleurs titres de Clarika. A trois reprises, de "Juste à temps" à "Chaque seconde avec toi", en passant par "Les mouettes", revient l'histoire d'une séparation douloureuse, avec celle qui fut sans doute la compagne du chanteur. Au détour des mouettes il y a cet aveu :
j'ai des envies de liberté
tout ce que j'ai jamais osé, je vais l'essayer
je vais me goinfrer de sushis
et picoler toute la nuit, maintenant que je suis en vie
et puis j'aimerai des garçons
pour une nuit ou pour de bon
voir si je préfère pas les garçons
Le texte est de Stéphane Corbin. Un autre, de son frère, s'intitule "Avec un homme", et module sur le thème de "je vis avec un homme/ça ne devrait pas faire une histoire" un droit à l'indifférence vivement revendiqué. Voilà qui est dit. Son frère lui a aussi écrit un texte rigolo et doucement non-conformiste "Un homme d'intérieur", qui renverse les rôles de "genre". C'est là sans doute qu'on doit le plus penser à Bénabar, même s'il n'y a pas l'obsession baroque des détails qui fait la touche particulière de ce dernier. Dans une toute autre veine, "Dimanche 6 août" raconte une histoire très triste, bouleversante, avec une élégance qui rappelle les plumes les plus délicates de la chanson française.

corbin-stephane.jpg

En résumé, et sans vouloir dévoiler l'ensemble du disque, ce sont de bien belles promesses que nous offre Optimiste. J'aurai gagné ma peine si je vous ai donné envie d'aller y voir d'un peu plus près. On peut écouter quelques chansons sur Myspace et l'album peut se commander par un lien spécifique.

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