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Rencontre avec de jeunes hommes remarquables

Quand on me demande quels acteurs j'aime au cinéma, il m'est toujours plus facile de donner des noms d'actrices, parce que celles que j'aime sont assez connues. En revanche, c'est plus compliqué pour les hommes. Bien sûr, comme tout un chacun, je pourrais citer quelques célébrités, mais ce n'est pas pour autant que je me déplacerais pour aller les voir à chaque film qui sort.
 
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Paul Dano au festival de Berlin
En revanche, tel est le cas pour Vincent Branchet ou Paul Dano. Sur Vincent, j'ai déjà écrit un long texte sur ce blog (c'est ici). Je suis attristé par son absence présente dans le cinéma français. J'espère qu'il refera bientôt surface, parce qu'il est inimaginablement doué.
Et donc, j'aimerais écrire quelques lignes sur trois acteurs que j'aime beaucoup et qui sont très mal connus en France. Ils partagent plusieurs caractéristiques qui pourront surprendre : ils ont une vingtaine d'années, ils habitent aux États-Unis et ils se sont distingués dans des films dits "indépendants". En crescendo : Ryan Kelley, Jamie Bell et surtout Paul Dano, qui est le plus à même de devenir un phénomène mondial.
 
 

 

 

Ryan Kelley dans Outlaw Trail
Ryan Kelley est né le 31 août 1986 à Glenn Ellyn dans l'Illinois. Ses parents ont eu cinq enfants et en ont adopté neuf autres. Il a commencé sa carrière cinématographique à deux ans... Il a joué dans un nombre impressionnant de séries télé. Il a notamment marqué les esprits par son interprétation du personnage de Ryan James, le petit garçon qui meurt dans Smallville. Mais c'est surtout dans Mean Creek de Jacob Aaron Estes (2004) qu'il est extraordinaire, aux côtés notamment de Scott Mechlowicz, Rory Culkin et Carly Schroeder. Sa composition d'un adolescent sensible en butte au bashing (harcèlement) et doté d'une grande rectitude morale est en tous points remarquable. Mean Creek est un très grand film, qui n'a pas eu le retentissement qu'il aurait dû avoir. Depuis, Ryan a joué dans plusieurs films dont il était la tête d'affiche : Outlaw Trail de Ryan Little (2006), Still Green de Jon Artigo (2007), à ma connaissance non distribués en France.
Comme vous pouvez le constater sur les deux photos, Ryan Kelley est particulièrement beau gosse.
 
Rajout ultérieur : le 24 janvier 2009 est passé pour la première fois aux USA un téléfilm réalisé par Russel Mulcahy (l'un des deux pères du Queer as Folk américain), intitulé Prayers for Bobby. C'est "l'histoire vraie de Mary Griffith [...] dont le fils gay se suicida à cause de l'intolérance religieuse de sa mère." Depuis, ce téléfilm a été diffusé par M6 sous le titre Bobby seul contre tous. C'est Ryan Kelley qui incarne le personnage. L'histoire est basée sur un livre éponyme de Leroy Aarons (1995) et se déroule dans les années 1980. J'ai consacré un post à ce rôle, qui a fait découvrir Ryan Kelley à une audience large.
(image extraite de Prayers for Bobby)
 
 
HallamFoeReview2.jpgLa carrière de Jamie Bell a commencé comme une fusée avec Billy Elliott de Stephen Daldry (2000), dont il interprétait le rôle titre. Depuis, il a joué notamment dans le magnifique L'Autre rive (Undertow) de David Gordon Green (2004), King Kong de Peter Jackson (2005), Dear Wendy de Thomas Vinterberg et Lars Von Trier (2005), Jumper de Doug Liman (sorti en France au printemps 2008) et surtout le très réussi Hallam Foe de David Mackenzie (image ci-contre, sorti en juillet 2008), etc. Encore un "kid actor", mais qui a su magistralement négocier une carrière exigeante, alternant les grosses productions (La Tranchée, King Kong, La Gloire de nos pères, Jumper) et les films d'auteur (L'Autre rive, Dear Wendy, Hallam Foe).
arts-film-billy-elliott270x210.jpgJamie Bell est né le 14 mars 1986 à Billingham, dans une banlieue prolo du Nord de l'Angleterre. Comme il l'a indiqué dans plusieurs interviews, il y avait bien des proximités entre son itinéraire personnel et celui de son personnage Billy Elliott, sauf que lui a renoncé définitivement à la danse depuis. Il a déjà sa notice sur Wikipédia (voir l'article), un fan club anglais et une cote de plus en plus élevée dans le cinéma anglo-américain, malgré un physique assez peu évident (difficile d'en faire un jeune premier - il  ressemble parfois à Malcolm Mac Dowell !). Les interviews en ligne que j'ai pu consulter montrent un jeune homme particulièrement mûr et soucieux de contrôler sa carrière. Il a été un temps le petit ami officiel de la starlette Evan Rachel Woods. Il est très lié avec Charlie Hunnam (le wonderboy qui jouait le rôle de Nathan dans le Queer as Folk anglais). Dans Jumper (qui a l'air d'être un navet, à en juger par les réactions de ma presse préférée), il donne la réplique à Hayden Christensen, Dark Vador à la retraite.
Jamie Bell est un remarquable acteur, assez anglais finalement, avec ce mélange de naturel et d'énergie qui fait merveille dans L'Autre rive et Dear Wendy. Manifestement, Billy Elliott est une sorte de fantôme qu'il n'a eu de cesse d'exorciser afin de pouvoir vivre une vie d'acteur à part entière, même s'il ne nie pas avoir été profondément et durablement marqué par cette incarnation. C'est un rôle aux antipodes du personnage de Billy dans une adaptation télé de Nicolas Nickleby qui lui a permis d'échapper au poids de ce personnage inaugural (qui ne fut pourtant pas le premier).
Sa composition dans Hallam Foe (en français [sic !] : My Name is Hallam Foe) de David MacKenzie est absolument époustouflante. Il y incarne un post-ado perturbé par la mort de sa mère, qui abandonne le manoir familial pour aller jouer les monte-en-l'air (référence à Spider-man ?) à Glasgow et filer une jeune femme qui ressemble étrangement à la défunte. Cette expérience est une sorte de voyage initiatique qui frôle des expériences-limite (harcèlement, clochardisation, prostitution, inceste, meurtre) sans jamais y basculer. Le personnage est tout à la fois ingénu et inquiétant (voyeur, paranoïaque). Cette ambiguïté est sans doute la clé de voute du film et ce qui fait son intérêt comme peinture d'une jeunesse à tâtons. Le cinéaste me semble avoir retrouvé quelque chose de la grâce du free cinema des années 1960 et particulièrement des films de Lindsay Anderson. Et il a trouvé en Jamie Bell l'interprète parfait (de naturel et de rouerie) pour un rôle assez difficile.
 
5051.jpgJ'en arrive enfin à mon préféré, un acteur qui est déjà immense, alors qu'il est encore très jeune. Paul Dano est né le 19 juin 1983 selon les sites de fan et un an plus tard selon IMDb... Ce qui lui fait bientôt 24 ou 25 ans selon les cas... Non content de faire l'acteur, il joue aussi dans un groupe de rock tout à fait fréquentable, Mook. Pour les curieux, le groupe a une page sur Myspace (facile à trouver).
Paul Dano a été révélé par l'extraordinaire premier film de Michael Cuesta, L.I.E. (Long Island expressway). Il y joue le rôle d'Howie, ado perturbé, poète à ses heures, orphelin de mère, délaissé par un père fraudeur, et sympathisant avec un pédophile au comportement imprévisible (photo ci-dessous). Il a joué finement des seconds rôles dans plusieurs films assez faibles, comme Le Club des empereurs (2002) et Girl Next Door (2003). Dans le troublant The King (2005) de James Marsh, il incarne le rejeton un peu niais d'un prédicateur poursuivi par un fils naturel (incarné par Gael Garcia Bernal). Dans ce film-là, c'est surtout le wonderboy mexicain qui livre un numéro de comédien bluffant.
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Long Island expressway
Le rôle explosif et hilarant d'ado mutique et buté (Dwayne) dans Little Miss Sunshine de Valerie Faris et Jonathan Dayton (2006) a valu à Paul Dano un tombereau de louanges. Il faut dire qu'il tenait la dragée haute à une palanquée d'acteurs d'exception : Steve Carell, Alan Arkin, Toni Collette... Il a aussi un rôle de premier plan dans Fast Food Nation de Richard Linklater (2006). Et le rôle du prêtre Eli Sunday dans There Will Be Blood de Paul Thomas Anderson (qui est sorti en France le 27 février) lui a donné le statut d'acteur de premier plan qui lui manquait.
 
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Paul Dano (g), Paul Thomas Anderson (d)
Ce n'est pas seulement la palette de jeu dont Paul Dano dispose qui impressionne. Il a fait preuve depuis ses débuts d'une exigence artistique hors du commun, alignant les films exigeants (LIE, The King). Dans les interviews dont je dispose, il affirme d'ailleurs ne pas vouloir déroger à cet impératif artistique. Son physique un peu particulier, son gros nez, ses pommettes protubérantes et ses joues creuses, ne font pas de lui le plus bankable des jeunes espoirs du cinéma américain, mais à mes yeux l'un des plus talentueux. Dans There Will Be Blood (photo ci-dessus), il fait encore plus shabby que dans d'autres films, mais son incarnation d'un jeune prêtre fanatique est étonnante. Je ne serais jamais allé voir ce film dans des circonstances ordinaires (le thème me barbait, j'avais lu des critiques mitigées), mais avec Paul Dano dedans, ça change tout. Au reste, le film est complètement écrasé par le numéro de Daniel Day Lewis, omniprésent d'un bout à l'autre. Et la scène finale, grotesquement théâtrale, me semble gâcher l'ensemble...
Presque tous les sites thématiques sur le cinéma en français lui consacrent désormais une notice (il suffit de le googliser). Quant à son groupe, Mook, il s'écoute notamment sur www.reverbnation.com/mook. Il chante (très bien) et joue de la guitare.
Paul Dano est grand ! C'est l'échalas du cinéma.
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