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Anachroniques ?

Je n'ai guère le temps de rédiger des posts en ce moment, et j'en suis vraiment désolé. Si tout se passe comme je le souhaite, j'aurai bientôt plus de disponibilité...
 
J'ai fini un gros pavé pour les ados, Absolute Brightness de James Lecesne, il y a déjà une semaine. J'en rendrai compte dès que possible. J'attends avec impatience la sortie de la traduction par Blandine Longre de The Perks of Being a Wallflower de Stephen Chbosky (titre français : Pas raccord, publié aux éditions Sarbacane). Entre les deux quelques déceptions : Foot foot foot de Denis Lachaud, A mort l'innocent d'Arthur Ténor et (déjà mieux) Acte II de Michel Le Bourhis...
 
Foot foot foot est un roman pour les 8-10 ans (à peu près) d'un intérêt très limité : c'est l'histoire d'un garçon qui vit avec ses deux mamans et son frère, et qui est très heureux. La couverture, avec son graphisme très fifties, est un mauvais présage. Il n'y a quasiment pas d'intrigue. C'est une oeuvre de prosélytisme qui "démontre" que les enfants grandissant dans une famille homoparentale sont heureux et normaux. Je n'avais pas besoin d'être convaincu, mais pourquoi pas à la limite, si le livre en valait la peine ? L'ennui, c'est que ça n'a aucun intérêt littéraire, ou même simplement romanesque. L'auteur a attribué diverses caractéristiques à quelques personnages et se contente de les décliner en un tableau statique. La langue est d'une platitude désespérante. Pourtant, Denis Lachaud a écrit un joli premier roman, J'apprends l'allemand. Après la déception du suivant, j'avais cessé de m'intéresser à sa production. Les sinistres duègnes du site choisirunlivre m'ont donné envie de lire celui-ci. Mal m'en a pris. On dirait un livre en carton-pâte, morne et sans attraits.
 
A mort l'innocent est aussi une oeuvre militante, et là encore je me sens en porte-à-faux. C'est l'histoire d'un instituteur qui arrive dans un petit village en 1965. Il est immédiatement l'objet de ragots, car il a un genre peu ordinaire. Bref, certains le suspectent d'être un "pédé". Mais c'est un formidable enseignant et Rémy, le-héros-qui-se-souvient, se rappelle son émerveillement ingénu devant ce maître d'exception. Mais une tragédie survient : un copain du héros est retrouvé mort. Les soupçons se portent immédiatement sur l'instituteur. Le piège se referme peu à peu sur lui. On s'enfonce dans une situation de plus en plus ignominieuse, de plus en plus injuste. Mais Rémy, que l'on dirait sorti d'un roman pour la jeunesse de cette époque-là, a décidé de mener sa propre investigation. Notre enquêteur en herbe, contre les préjugés mesquins, va se lancer à l'assaut des évidences.
C'est peu dire qu'il est difficile d'être en désaccord sur le fond avec la dénonciation des "villages sans prétention" où se font les "mauvaises réputations". Mais dans un style qui pastiche inconsciemment une littérature jeunesse d'un autre âge, cela donne un résultat on ne peut plus décevant. Au reste, la situation est particulièrement manichéenne et l'écriture pour tout dire un peu niaise, avec ses moments de poésie à la Maurice Carême. L'histoire oscille entre le point de vue de Rémy-enfant et des incursions dans la psyché ou le vécu des adultes. L'ensemble est mal ficelé, avec des partis-pris techniques pas terribles. J'ai presque honte de dire du mal d'un livre animé par de si louables intentions, mais ça a quel intérêt, de ternir un beau sujet par de la prose fade ?
 
Michel Le Bourhis a l'avantage d'une réelle écriture et d'un indéniable sens romanesque. Acte II entrelace les trajectoires d'un adolescent emprunté, Vincent Michel, et d'un enseignant-homme de théâtre échoué au lycée d'Avranches, Frédéric Simot. Le jeune homme est un écrivain en herbe, curieux de littérature et qui s'éveille au désir des filles. Le professeur a été muté précipitamment dans le lycée quelques années auparavant. Il mène une existence monacale, entre son job et sa passion (la mise en scène). C'est un solitaire intempestif, souvent féroce, exigeant avec les autres.
Curieusement, les deux trajectoires ne font que se frôler. Le livre refermé, j'en étais encore à me demander ce qui avait motivé l'auteur à superposer ces deux histoires qui ont si peu à se dire. Ou alors était-ce précisément cela que Michel Le Bourhis avait voulu figurer : une rencontre avortée ? Certains détails maladroits laissent à penser que l'auteur a transposé dans un contexte contemporain une histoire vécue quelques décennies plus tôt (dans les années 1980 ?) en habillant le décor d'ustensiles d'aujourd'hui. Pourtant, certains éléments sont d'un autre temps : que voici une petite troupe d'élèves de seconde d'un lycée de province qui communient dans la passion des livres, et notamment de Britannicus de Racine. Quelle jolie idée de fiction. Il ne s'agit pas pour moi de suggérer que les élèves d'aujourd'hui ne pourraient pas s'emballer pour une tragédie classique. C'est le déroulé de la situation qui est peu plausible ici.
Pour le reste, j'aime assez l'écriture de Michel Le Bourhis, qui manifeste une certaine maîtrise (même si certains élans poétiques sont parfois un poil appliqués). J'aime vraiment bien son plus récent (et gay) Il y a des nuits entières (paru en 2006, soit cinq ans après celui-ci), que je n'ai jamais vraiment chroniqué. Une autre fois ?
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Merci pour ce compte-rendu, bon week-end !
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